TOUR DE BRETAGNENos actualités

HUREL, DAHL ET DE WULF, EN FORCENÉS

C’était une affaire de forcenés, car le vent soufflait, parfois en rafales, et la pluie s’invitait, par intermittence, pour détremper un peloton étiré par la nature des routes, passant de Morbihan en Finistère par les Roches du Diable. Oui, c’était un parcours diabolique, qui résonnait en écho des propos de Matteo Malucelli, vainqueur la veille et persuadé que le Tour de Bretagne 2018 était moins dur que la précédente édition. « C’est souvent au troisième jour de course que les différences s’opèrent », savait à juste titre Tony Hurel, de l’expérience de ses trente ans, dont sept chez les pros, sous les couleurs d’Europcar et de Direct Energie.

Jean-Louis Conan, ténor du cyclisme breton dans les années 80, avait déniché des routes inédites dans les courses de vélo – et pourtant, elles ne manquent pas depuis un siècle, dans les parages ! Elle a fait mal, cette côte de Moulin Bouriou, juste avant Guiscriff. Warren Barguil s’était posté au bon endroit pour encourager ses coéquipiers de Fortuneo-Samsic. Au surlendemain de la visite de Cyrille Guimard et au lendemain de celle de Marc Madiot, aucun doute, les grands noms du cyclisme français savent qu’il se passe forcément quelque chose d’intéressant au Tour de Bretagne.

Beaucoup de concurrents ont connu de cruelles désillusions entre Baden et Clohars-Carnoët. Il fallait voir, les larmes aux yeux, le Néo-Zélandais de l’UC Nantes-Atlantique, Ian Talbot, rejoindre son clan : il était dans la bonne échappée mais il a glissé. Malucelli, victime d’une crevaison dans un moment de bagarre intense, a rallié l’arrivée, moulu, dans un groupe d’attardés. Était-ce une prémonition ? Son jeune coéquipier costaricain Kevin Rivera avait répondu avant le départ aux journalistes curieux de sa vision de son avenir : « Comment voulez-vous que je le prédise, je ne sais déjà pas si je suis capable de terminer le Tour de Bretagne… » De fait, il a abandonné. Jakub Mareczko a failli l’imiter mais s’est classé dernier. La star montante du sprint italien n’aura donc pas renouvelé en Sud-Finistère sa victoire de l’an passé à Scaër.

La peur était dans l’air. « J’ai pris une grosse gamelle hier à 700 mètres de l’arrivée, j’ai des points de suture au genou, a expliqué Tony Hurel. Avec la pluie et le vent, je supposais que le général allait se jouer aujourd’hui. Comme je ne voulais pas prendre de risques, sur les petites routes sinueuses, je suis parti dans une échappée matinale, qui a été revue, et je suis ressorti dans un groupe de six avant le circuit final. J’ai vite vu que De Wulf était très fort et je savais, forcément, depuis la première étape qu’il a remportée au sprint, que Dahl était rapide. J’ai dû manœuvrer finement. Je n’ai plus passé de relais aux 3km. Remporter une étape au Tour de Bretagne, c’était mon objectif. J’ai couru avec le couteau entre les dents. »

Herman Dahl était dans le même état d’esprit. « Ayant déjà remporté une étape au sprint, je voulais courir de manière offensive mais j’ai dépensé beaucoup d’énergie au cours de cette étape, s’est exprimé le Norvégien, deuxième de l’étape et de nouveau leader au général. J’ai sans doute lancé mon sprint de trop loin. Ça sera peut-être difficile après une étape aussi éprouvante mais c’est tentant de jouer le classement général désormais. J’espère que c’est le début de quelque chose de grand. » Malgré le coup de force des neuf concurrents parvenus à se disputer la victoire d’étape, les hommes du peloton ayant franchi la ligne dans l’intervalle d’une minute n’ont pas perdu tout espoir de remporter le Tour de Bretagne, mais il va leur falloir rattraper le temps perdu sur Stan De Wulf, déjà le grand favori avant le départ de Châteaubriant !

Jean-François Quénet

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